Mais comment donc est venue cette idée de non-scolarisation ?
Ce n’est pas à proprement parler un choix mais une évidence. Je ne me rappelle pas avoir cru que l’école était obligatoire, avoir appris qu’elle ne l’était pas, ni m’être un jour demandée si mon/mes enfants seraient ou non scolarisés. Je crois que cette évidence s’est imposée petit à petit pendant ces longues années sans enfant, et quand Choupinette est venue je savais déjà qu’elle n’irait pas à l’école, sans avoir besoin de prendre cette décision.
Je pense que ce qui a motivé cela au départ, c’est une grosse prise de conscience de ma part du conditionnement dans lequel j’avais été enfermée depuis ma petite enfance et duquel j’essayais péniblement et douloureusement – mais de plus en plus lucidement – de sortir.
Quelques raisons « objectives » : le gaspillage de temps passé à ne rien apprendre, pas envie de soumettre toute la famille à un rythme artificiel et imposé, pouvoir partir en vacances quand on veut, pouvoir accompagner notre enfant dans sa découverte du monde, à son rythme, en fonction de ses centres d’intérêt, respecter sa créativité en étant le moins directifs possibles, lui laisser l’initiative de ses apprentissages, et apprendre ensemble…
Tout ce temps qu’il m’a fallu à moi pour comprendre que j’avais le droit de penser ce que je pense et d’être ce que je suis.
Et puis un refus de toutes mes cellules de remettre l’avenir de mon enfant, sa sensibilité, son innocence, dans les mains d’inconnus qui ne la connaîtraient pas comme je la connais, qui ne l’aimeraient pas comme je l’aime et ne la respecteraient pas comme je la respecte.
Peut-être que si j’avais été spécialement heureuse à l’école, si j’en avais gardé des super souvenirs, aurais-je voulu que ma fille connaisse aussi cela. Ce n’est pas le cas, mais j’aurais détesté encore plus rester à la maison. Mes relations avec ma mère n’ont rien à voir avec celles que j’ai avec ma fille (heureusement ;-).
A ceux qui pensent qu’il faut habituer un enfant à subir le plus tôt possible contraintes et humiliations et apprendre à obéir, parce que la vie n’est pas une vallée de roses, je réponds qu’au contraire il n’est jamais trop tôt pour apprendre que l’on peut être acteur de sa vie, qu’il n’est pas inévitable de se soumettre à des contraintes arbitraires et que la désobéissance est parfois une simple question de dignité.
A ceux qui associent instruction en famille et isolement des enfants, je réponds que si enfermement il y a c’est plutôt dans les établissements scolaires, où l’on isole les enfants de la vie, de la société, en les enfermant à l’intérieur d’une tranche d’âge, d’un groupe restreint toujours le même, d’une relation hiérarchique à un seul adulte. Rien à voir avec la vie réelle.
Je revendique pour mon enfant le droit de penser autrement.
Je n’accepterai à aucun prix que cette magnifique liberté nous soit retirée. Si demain Choupinette veut aller à l’école, elle sait qu’elle le pourra (mais non, pas demain en vrai quand même, c’est une image enfin !), mais ce sera SON choix.
J’écris « je » parce qu’ici c’est moi qui écris et ça ne me viendrait pas à l’idée de parler à la place de quelqu’un d’autre, mais nous avons toujours été Pounet et moi sur la même longueur d’onde et ce choix nous est absolument commun. Ce qui est une vraie chance.
Texte écrit pour le premier épisode de la farandole sans école.